Fly with me (3/7)

Je me réveillais, doucement d’abord puis, me souvenant de ce qui s’était passé, je me relevais soudainement. Je grimaçais, posant ma main sur mon bras droit. Des bandages l’entouraient. Une infirmière s’approcha aussitôt de moi, me posant des questions générales auxquelles je lui répondis puis elle amena un médecin. Il me fit savoir que je fus sauvée de justesse et que ma blessure n’aurait pas de séquelles trop graves. On me garda tout le restant de la journée puis je fus autorisée à sortir de l’hôpital le soir. Je rejoignis mes camarades dans le dortoir et celles-ci m’accueillirent les bras grands ouverts. J’étais heureuse de les revoir mais je leur fis savoir que mon service allait certainement se terminer maintenant. Je ne pouvais pas utiliser mon bras et serais donc impossible de faire quoi que ce soit. Mon rétablissement prendrait plusieurs jours voire plusieurs semaines, on ne pouvais pas me garder, je n’étais plus utile. Nous nous endormirent toutes, attendant la confirmation le lendemain matin qui serait décisive.
De bonne heure, je fus conviée par le Lieutenant-colonel. Comme je pouvais m’en douter, mon travail en tant qu’ouvrière prenait fin. Je pensais déjà à mon retour parmi ma famille, à reprendre le travail à la ferme me disant que ce n’était pas plus mal. Néanmoins, il me fit savoir que je resterais parmi eux et ce jusqu’à nouvel ordre. Pourquoi ? Quelle serait mon utilité ? Beaucoup de questions envahirent mon esprit. Il m’amena dans la pièce où je m’étais déjà retrouvée le premier jour de mon arrivée. Il y régnait la même ambiance. Plusieurs jeunes femmes s’y trouvaient. Puis on m’attribua, à ma grande surprise, la responsabilité former ces jeunes femmes. Cette disposition permettait à ce que mon bras puisse se rétablir afin de pouvoir reprendre mon travail.
Les journées passaient et mon travail de formatrice continuait. Ma vie avait quelque peu changée, puisque je détenais un rang plus élevé que les autres femmes ouvrières. Mon bras se rétablissait lentement mais je n’avais déjà plus de douleurs. Tout se déroulait dans l’ordre et cette fois en sécurité. J’appris plus tard que le pilote à l’origine de mon accident était bien arrivé à destination. Ce fut pour moi une victoire intérieure car cet avion m’avait donné tellement de peine que j’en étais à deux doigts de tout laisser tomber. Plus les jours avançaient, plus le rythme devenait soutenu et le sentiment d’angoisse et de pression s’accentuait. On savait que la situation était urgente et le besoin de plus en plus de main d’œuvre se faisait ressentir.
Lorsque je fus enfin capable de commencer à utiliser mon deuxième bras, on m’autorisa à reprendre le travail. Néanmoins je continuais toujours à superviser les apprentis et parfois me faisais aider par elles, mon bras étant toujours fragile. Un jour, un avion venu directement du front arriva. Malgré sa carrosserie abîmée, on devinait la carrure imposante et l’immensité sublime de cet engin. Ce n’était pas n’importe quel avion, il s’agissait d’un modèle que je n’avais jamais vu auparavant mais je savais que ce n’était pas pour un soldat de première classe. Je demandais à plusieurs jeunes femmes de commencer à le laver avant de m’atteler aux réparations. La beauté de cet avions me saisissait. La structure et le squelette avaient été fait d’une précision telle qu’il n’y en avait jamais eu en Europe. Je me dirigea vers mon bureau improvisé, monté par quelques planches de bois, situé au centre du hangars. Je pris un papier et un crayon demandant à une jeune apprenti de me faire la liste des choses à réparer pendant que j’écrivais. Je profitais de cette opportunité pour former ces jeunes femmes. Faisant le tour de l’avion, j’inscrivais et notait soigneusement la liste tout en prenant le temps au passage de valider chaque étape des réparations. Soudain, un aspect de l’avion m’arrêta, situé sur le flanc droit de l’avion, prêt de l’aile. Je pus lire une inscription, sûrement le nom de l’avion, difficilement visible sous l’amas de poussière : K.A.I – 88.
Le lieutenant-colonel arriva par derrière, et je me mis aussitôt en position de salut. Derrière lui suivait un pilote, encore inconnu pour moi. Analysant son uniforme, il possédait un grade assez élevé. Ce devait être le nouvel arrivant et vu ses traits physiques, il venait d’un pays asiatique. Grand, assez imposant, les yeux bridés et la beau basanée, le jeune homme discutait avec le lieutenant-colonel et semblait perplexe.
– Voici Kim Jongin, pilote de chasse. Il vient de Corée pour aider les pays alliés. Et voici Mikoyan-Gourevitch MiG-15, son modèle d’avion. Il a malheureusement subit quelques perturbations durant le trajet.
– Que s’est-il passé ? Demandais-je pour mon rapport
– Il a traversé la manche pour venir jusqu’à nous.

Je compris la raison de cette transformation en épave. La traversée Angleterre-France était périlleuse car la guerre faisait rage autant sur terre, sur mer qu’au ciel.

– Il est entre vos mains, acheva le lieutenant-colonel.

Je fis mon salut devant les deux hommes et me mis directement au travail une fois ceux-ci partis. C’était un modèle sur lequel je n’avais jamais travaillé mais cette nouvelle mission me plaisait énormément. Je n’avais pas le droit à l’erreur car nous savions ô combien le temps nous manquait. Ce Kim Jongin pouvait partir n’importe quand, une fois l’ordre donné.
Après une semaine intense de réparations, essayant tant bien que mal à redonner forme et splendeur à cet avion, les filles finirent par me convaincre de venir à la guinguette ce week-end. Il était vrai, j’avais vraiment besoin de penser à autre chose et de changer d’air. Je me mis donc à commander une boisson et attendit au bar, adossée contre celui-ci pour avoir la vue sur la piste de danse. Beaucoup de pilotes et de jeunes ouvrières se donnaient rendez-vous pour s’ammuser et d’oublier en l’espace d’une soirée la réalité de la guerre. Je pris ma boisson puis tendit mon billet au serveur mais on me devança.
« Non ». Je tournais la tête vers cette voix.
« C’est pour moi » lança le fameux « K.A.I – 88 ».

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